Qu’est-ce qu’un intermédiaire de l’Internet ?
Module 2: Introduction aux droits numériques
Les intermédiaires de l’Internet jouent un rôle important dans la protection de la liberté d’expression et de l’accès à l’information en ligne. Un intermédiaire de l’Internet est une entité qui fournit des services permettant aux personnes d’utiliser l’Internet, qui se répartissent en deux catégories : (i) les conduits, qui sont des fournisseurs techniques de services d’accès Internet ou de transmission ; et (ii) les hôtes, qui sont des fournisseurs de services de contenu, tels que des plateformes en ligne (par exemple des sites web), des fournisseurs de mise en cache et des services de stockage(1)
Voici quelques exemples d’intermédiaires de l’Internet :
- Les opérateurs de réseaux, tels que MTN, Econet et Safaricom.
- Les fournisseurs d’infrastructures de réseau, tels que Cisco, Huawei, Ericsson et Dark Fibre Africa.
- Les fournisseurs d’accès Internet, tels que Comcast, MWeb et AccessKenya.
- Les fournisseurs de services Internet, tels que Liquid Telecommunications South Africa, iBurst, Orange et Vox Telecom.
- Les réseaux sociaux, tels que Facebook, Twitter et LinkedIn.
L’une des questions les plus difficiles concernant les intermédiaires de l’Internet est de savoir s’ils constituent des éditeurs au sens traditionnel du terme. Un fournisseur de services Internet (FSI) est-il responsable du contenu qu’il héberge pour le compte d’autrui ? De plus en plus, les tribunaux constatent qu’un FSI ne « publie » pas plus que le fournisseur de papier journal ou le fabricant de matériel de diffusion. Comme l’a souligné le Rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté d’expression en 2011 :
Le fait de tenir les intermédiaires pour responsables des contenus diffusés ou créés par leurs utilisateurs porte gravement atteinte à la jouissance du droit à la liberté d’opinion et d’expression, car cela conduit à une censure privée autoprotectrice et trop large, souvent sans transparence et sans respect de la légalité ».(2)
Certains pays d’Afrique ont des lois qui prévoient la limitation de la responsabilité des intermédiaires, comme le Ghana et l’Ouganda.(3) Pour se protéger de la responsabilité même dans les cas où une telle législation n’existe pas, les intermédiaires élaborent souvent des conditions générales qui précisent leurs responsabilités et celles de leurs clients.(4) D’autres pays d’Afrique ont des lois qui rendent explicitement les intermédiaires responsables de leurs actions concernant le contenu publié en utilisant leurs services.(5) La Haute Cour de Tanzanie a statué en 2017 dans l’affaire « Jamii Media v The Attorney General of Tanzania and Another »(6) que les demandes du gouvernement pour la divulgation d’informations sur les utilisateurs par un intermédiaire Internet étaient justifiées, et que la loi régissant ces divulgations n’était pas inconstitutionnelle, malgré l’absence de réglementation pour régir l’application de la loi.(7)
En outre, les États ont de plus en plus recours à des intermédiaires pour contrôler l’Internet en demandant directement de retirer des contenus ou d’interférer avec l’accès à l’Internet, des décisions qui sont souvent prises en dehors des cadres juridiques et réglementaires officiels et qui manquent de transparence et de contrôle public.(8) La République démocratique du Congo, par exemple, stipule dans l’article 50 de la Loi-cadre n°013/2002 sur les télécommunications que le refus de faire droit à la demande de l’autorité peut entraîner le retrait temporaire ou définitif de la licence d’exploitation ou d’autres sanctions. Après les protestations contre le gouvernement du Zimbabwe début 2019, le chef d’un important fournisseur de télécommunications, Econet, a franchement expliqué aux clients que les limitations de l’accès au réseau étaient une réponse directe à une directive du gouvernement du Zimbabwe.(9) Cela a clairement de graves conséquences sur la liberté d’expression en ligne.